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6 mars 2024

L’espace pourrait-il être l’ultime domaine d’application de ce nouveau manipulateur robotique?

Des chercheurs des Laboratoires Nucléaires Canadiens (LNC) conçoivent un manipulateur déployable sur le terrain et réinventent la façon de travailler avec des matériaux radioactifs

Le terme « cellule chaude » désigne une chambre de confinement blindée qui permet aux opérateurs nucléaires de travailler en toute sécurité sur des substances hautement radioactives à l’aide de manipulateurs mécaniques. Ces installations spécialisées sont coûteuses à construire et rares, deux raisons pour lesquelles les chercheurs Scott Read et Kevin McCaugherty, du service chargé de la mise au point des équipements mécaniques des LNC, ont eu l’idée d’étendre les capacités des cellules chaudes au-delà de leur lieu d’implantation.

Ce projet, appelé cellule de manipulation modulaire portable de haute précision, est désormais un projet pluriannuel financé par le plan de travail fédéral sur les activités de science et technologie nucléaires d’Énergie atomique du Canada limitée. Ce nouveau concept, aussi plus simplement appelé manipulateur portable, suscite l’intérêt pour ses applications terrestres et extra-terrestres potentielles.

Alors qu’un manipulateur traditionnel est conçu pour être installé en permanence dans une cellule chaude et est assez volumineux, le manipulateur déployable sur site peut être facilement conditionné, décontaminé et stocké en vue de son transport et de son assemblage. La nouvelle conception alliera une robotique avancée et des capacités modernes de télésurveillance. Cette combinaison présente un autre avantage : le fonctionnement autonome. Autrement dit, un manipulateur de cellules chaudes conventionnel nécessite l’intervention d’un opérateur, laquelle se traduit par un résultat de manipulation; ce manipulateur portable sera quant à lui capable d’effectuer davantage de tâches de manière autonome grâce à de nouveaux mécanismes de commande.

« Grâce aux progrès de l’apprentissage automatique et de l’intelligence artificielle (IA), nous pouvons exploiter toutes les avancées réalisées dans les environnements de simulation pour les bras de robots industriels », explique M. Read. « Cela signifie que nous pouvons nous préparer en amont, créer des simulations d’une tâche de travail, la programmer dans un logiciel de simulation et générer un code qui peut contrôler le bras robotique, garantissant ainsi une exécution efficace de la tâche grâce à des mouvements très précis. »

Précision et dextérité sont toutes deux indispensables. « Le manipulateur possède au moins six degrés de liberté, c’est-à-dire six axes distincts autour desquels le bras du robot peut se déplacer. Cela contribue à garantir que l’organe effecteur (ou l’outil) peut atteindre une direction souhaitée et la pointer lors de l’exécution des tâches du manipulateur », ajoute M. Read.

En quoi consistent concrètement ces tâches? L’équipe a collaboré avec divers experts des LNC dès le début de la conception du manipulateur portable afin d’identifier les utilisations spécifiques qui pourraient en être faites. Grâce à cette concertation, elle a ciblé des applications couramment effectuées aux premiers stades d’un projet de déclassement d’une installation nucléaire. La caractérisation est un élément clé, c’est-à-dire les différentes tâches permettant d’identifier les risques radioactifs existants en vue de mettre en place un plan adéquat pour leur évacuation permanente sécurisée et la sécurité des travailleurs. Ce travail consiste à effectuer des mesures de rayonnement gamma et bêta, à réaliser une spectrométrie gamma pour connaître les radionucléides présents, ainsi qu’à effectuer des prélèvements de contamination générale pour mieux comprendre les risques de contamination labile dans l’environnement de travail.

Ce manipulateur innovant sera également capable d’effectuer des inspections visuelles, c’est pourquoi l’équipe étudie plusieurs caméras résistantes aux radiations pour sa conception. L’utilisation d’outils portatifs essentiels, comme une perceuse, une scie alternative ou une pince à usage général, sera déterminante pour son efficacité. Au moment de changer d’outil, le manipulateur portable se dirige vers le magasin et y dépose celui dont il n’a plus besoin.  Le magasin d’outils transfère alors cet outil vers un panier de stockage avant de présenter l’outil suivant au manipulateur portable pour qu’il le récupère et poursuive son travail.

Leur conception résistante aux radiations permet-elle d’envisager des applications spatiales? Le Canada est réputé pour sa contribution robotique aux missions spatiales, un fait largement reconnu. Aujourd’hui encore, l’Agence spatiale canadienne a été sollicitée par la programme Artémis de la NASA pour apporter son soutien, notamment dans le domaine de la robotique avancée pour les missions spatiales. La cellule de manipulation modulaire portable de haute précision des LNC pourrait-elle un jour être utilisée pour établir le Camp de base lunaire ou créer une passerelle? Attendons de voir ce qu’il en est!



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