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24 février 2025

Des chercheurs en environnement, la Nation Déné de Clearwater River, font équipe pour tester la toxicité du Po-210 dans les organismes d’eau douce

Il n’existe actuellement aucune directive canadienne sur la qualité de l’eau visant à protéger la vie aquatique du polonium-210, un radionucléide susceptible de s’accumuler dans les réseaux trophiques

De retour pour leur troisième année de travail sur le terrain, les chercheurs en environnement des Laboratoires de Chalk River (LCR) se sont rendus à la Nation Déné de Clearwater River (CRDN) dans le nord de la Saskatchewan, afin de collecter les échantillons nécessaires pour tester la toxicité du radionucléide polonium-210 (Po-210) dans les environnements d’eau douce.

Le nord de la Saskatchewan abrite de nombreuses mines d’uranium du Canada, où l’activité minière fait remonter à la surface de la terre une quantité accrue de radionucléide, l’uranium 238 (U-238), provenant des profondeurs du sol dans ces régions. En tant que dernier radionucléide de la chaîne de désintégration de l’U-238, le Po-210 peut potentiellement se concentrer dans les environnements avoisinants, sous certaines conditions environnementales.

Le Po-210 contribue de façon importante à la dose de rayonnement que tous les organismes vivants reçoivent des radionucléides naturels. De plus, il peut s’accumuler dans les organismes plus rapidement qu’ils ne peuvent le traiter, ce qui signifie qu’il peut s’accumuler dans les réseaux trophiques aquatiques. Malgré cela, il n’existe au Canada aucune directive sur la qualité de l’eau visant à protéger la vie aquatique contre le Po-210.

« Ces types de lignes directrices fournissent une base cohérente et éclairée par la science pour que le gouvernement évalue la qualité de l’eau et s’assure que la concentration de substances dans l’eau ne nuit pas à la santé des poissons, des plantes et des autres organismes qui y vivent », explique le biologiste environnemental Matt Bond, qui travaille sur un projet de recherche visant à mieux comprendre à quels niveaux le Po-210 peut devenir nocif pour la vie dans les environnements d’eau douce.

Le projet en est maintenant à sa troisième année, s’appuyant sur deux années de travail au cours desquelles Stephanie Walsh, technologue en recherche radioécologique, et lui-même ont étudié la présence et le comportement du Po-210 dans les régions canadiennes touchées par l’exploitation minière de l’uranium, en travaillant en étroite collaboration avec la CRDN. L’objectif est de recueillir les données nécessaires à l’élaboration de directives sur la qualité de l’eau spécifiques au Po-210.

(Un élève de la CRDN prélevant des échantillons environnementaux avec Matt Bond, biologiste environnemental des LNC)

L’automne dernier, les chercheurs et les élèves, enseignants et aînés de la CRDN ont prélevé de l’eau de lac et plus de 500 Hyalella azteca, une espèce de crustacé amphipode qui vit près du fond des plans d’eau douce et se nourrit de matière organique en décomposition.  Écologiquement importante en Amérique du Nord, l’espèce H. azteca est sensible aux métaux et aux radionucléides, ce qui en fait l’organisme idéal pour les tests de toxicité.

« Les êtres vivants absorbent les radionucléides de manière très différente, en fonction de l’environnement dans lequel ils vivent. Des facteurs environnementaux, tels que la chimie de l’eau, par exemple, influencent considérablement cette absorption. C’est pourquoi il était important de collecter à la fois des eaux de surface locales et une culture d’amphipodes sauvages pour les tests de toxicité, afin que les résultats reflètent vraiment la réalité », explique M. Walsh.

Le laboratoire de toxicité environnementale des LCR est spécialisé dans ces tests qui examinent comment les contaminants affectent la survie, la croissance et la reproduction des espèces. Actuellement, les H. azteca collectés s’acclimatent à la vie à Chalk River, où les tests de toxicité peuvent être effectués dans un environnement de laboratoire contrôlé, dans une eau ayant la même composition chimique que celle dans laquelle ils ont été collectés.

(Une culture en laboratoire de H. azteca)

Paul Haynes, enseignant de l’école de la Nation Déné de Clearwater River, affirme que les années de collaboration entre Matt Bond, Stephanie Walsh et les élèves ont permis d’établir des relations significatives et de prouver qu’il est possible d’établir des liens puissants en adoptant une approche décolonisée de l’éducation.

« Cette [collaboration] est bénéfique pour nos élèves, car elle leur offre des possibilités de calibre mondial d’en apprendre davantage sur l’évolution de leur environnement, tant d’un point de vue autochtone traditionnel que d’une approche scientifique occidentale », déclare Paul Haynes. « Cela leur donne l’occasion non seulement d’apprendre dans un environnement pratique, mais aussi de jouer un rôle actif dans la surveillance des effets de l’extraction des ressources naturelles sur leur territoire. »

Ce projet de recherche est financé par le programme du Plan de travail fédéral sur les activités de science et technologie nucléaires (FNTS) d’Énergie atomique du Canada limitée (EACL), qui met en relation les organisations, ministères et organismes fédéraux avec l’expertise et les installations en sciences nucléaires dont nous disposons aux Laboratoires de Chalk River. Dans le cadre de ce programme, nos chercheurs mènent des projets conçus pour soutenir les responsabilités et les priorités fondamentales du gouvernement canadien dans les domaines de la santé, de la sûreté et de la sécurité, de l’énergie et de l’environnement.



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